Les dimanche 29 et lundi 30 mai 1898, le Président de la République Félix Faure, est en visite à Saint-Étienne, point d’orgue des fêtes présidentielles qui se déroulent du 28 au 30 mai, avec retraite au flambeau le 28, arrivée du train présidentiel, discours et banquet le 29, visites de sites le 30. Malgré un programme très chargé, montrer Saint-Étienne, la ville noire, sous son meilleur jour passe par la colline de Chantegrillet et son École des Mines. Depuis 1852 et la visite de Louis Napoléon Bonaparte, aucun chef d’État ne s’est rendu à Saint-Étienne. Félix Faure, très sensible aux fastes et aux honneurs, a été surnommé le « Président-Soleil ». Il est reçu avec enthousiasme dans la ville décorée.
« Félix Faure fait partie des présidents qui utilisent abondamment la méthode encore originale des voyages en province pour séduire la population française. Ces périples épuisants faits d’une succession de discours, de défilés en tous genres et de remises de décorations peuvent prêter à sourire par leur faste, mais ils ont le mérite de faire connaître le chef de l’État, ce qui ne trompe d’ailleurs pas le journaliste du quotidien Le Soir qui écrit le 6 août 1896 : « Monsieur Félix Faure est un président voyageur, ce qui le rend populaire auprès des populations qui aiment l’apparat des cortèges officiels. Il est curieux de constater la persistance de l’effet que produisent des drapeaux, des arcs de triomphe et une escorte de cuirassiers. »
In Le Président-Soleil dans la ville noire, de C. Hayot, 2007.
Toutefois le président Félix Faure a émis des réserves sur la visite de l’École des Mines, de même que sur celle de l’École professionnelle. Le directeur de l’École, Louis Tauzin, a dû écrire le 29 mars 1898 au préfet de la Loire, argumentant sur l’importance de l’École au niveau local et il a proposé de réunir lors de cette visite des délégations des mines du bassin.
Une visite inoubliable
En ce lundi matin de Pentecôte, le Président de la République, présent depuis 24 heures à Saint-Étienne, part de la Préfecture pour arriver à 8 heures 15 à l’usine de Marcellin et Antoine Giron, qui fut la plus importante fabrique du ruban velours de France avec ses 476 métiers mécaniques, installée depuis 1867 au pied de la colline Chantegrillet. Pour s’y rendre, il passe par la place Fourneyron où a été érigé un des arcs de triomphe. La foule est encore dense et enthousiaste tout le long du parcours. Félix Faure reste une vingtaine de minutes dans l’usine Giron, rue de La Richelandière.
Le trajet pour rejoindre l’École des Mines par la rue de Fontainebleau (une partie de l’actuelle rue Mimard) puis la montée se fait à pied.
De nombreuses délégations de mineurs sont présentes et le Président s’arrête fréquemment pour leur parler. Puis il pénètre dans la cour d’honneur de l’École, parée de drapeaux tricolores, où il est accueilli au son de la Marseillaise, jouée par l’harmonie des mineurs de La Ricamarie et par les élèves en uniforme. Les caméras Lumière sont en action et deux des sept films en plan fixe d’une minute chacun, concerne le passage du président en extérieur.
La visite de l’École a lieu de 8 heures 35 à 8 heures 55. C’est à l’École, alors très associée aux mines, que le président Faure décide de remettre des médailles de sauvetage à douze personnes travaillant dans les mines de la région et 18 médailles d’honneur du travail.
Puis le Président de la République se consacre à l’École en discutant avec des élèves et en visitant la salle du musée de l’École, qui contient la collection géologique, les bustes, le monument aux morts…
Pour finir, le directeur de l’École, Louis Tauzin, prononce alors un discours dans lequel il montre l’importance de l’École et interpelle le gouvernement, par l’intermédiaire des ministres de la Guerre, de la Marine et du Commerce ayant accompagné Félix Faure, sur la différence de traitement, sur le plan militaire, des élèves des Mines de Saint-Étienne par rapport à ceux des autres écoles.
Le programme de la matinée se poursuit par une visite de l’École professionnelle, située en contrebas de l’École des Mines, puis de la manufacture nationale d’armes (MAS) et des aciéries Barrouin avant de rejoindre la Préfecture.
En souvenir de ce voyage, une avenue a été dénommée du nom du Président Faure, du 2 mars 1900 au 21 janvier 1941, avant de prendre le nom du maréchal Pétain jusqu’au 24 août 1944. À cette date, elle prend son nom actuel et symbolique d’avenue de la Libération.
À lire
Clémence Hayot (2007), La visite du Président Félix Faure à Saint-Étienne, les 29 et 30 mai 1898 : le Président-Soleil dans la Ville noire. Mémoire de fin d’études, Université Lyon 2 – Institut d’Études Politiques de Lyon, 72 p.
Fiche réalisée par Rémi Revillon, historien et Hervé Jacquemin, EMSE