Un ancien élève qui perdit la vie en faisant le zouave
Le 2 décembre 1870, Armand du Bourg, ancien élève périt dans un combat de la guerre franco-prussienne de 1870. Il s’agit de la première victime de l’École à décéder au cours d’un conflit
Un élève mal classé
Armand du Bourg est né à Toulouse (Haute-Garonne), le 18 mars 1845. Il est admis comme élève titulaire de l’École des Mineurs de Saint-Étienne, par décision ministérielle du 12 octobre 1865. Timide, d’une intelligence lente, mais très travailleur, il se classe successivement 20e, puis 19e sur 25 élèves à l’issue de sa seconde année. Il sort diplômé avec un brevet de 3e classe en 1867.
Le régiment des zouaves
Armand du Bourg s’engage pour la protection du pape. Dans le contexte de l’unification italienne, le domaine temporel du pape est menacé par les troupes de Garibaldi. Pie IX s’entoure d’une armée pontificale en 1860, constituée de volontaires étrangers. Lors de la défaite de Castelfidaro, une unité franco-belge s’illustre, constitue le cœur de cette armée papale, et devient un régiment de zouaves pontificaux. Le corps, sous le commandement de Charette, est très actif au cours de l’année 1867. Les États pontificaux sont envahis en septembre 1870, lorsque l’Empire français, son protecteur, se retire pour consacrer ses forces à la guerre contre la Prusse et ses alliés. Les zouaves français quittent Rome pour rejoindre Toulon, mais ils décident de continuer à se battre ensemble, mais cette fois pour la France. Le 7 octobre, ils se forment en légion de volontaires de l’Ouest, en fait deux bataillons, dans la 2e brigade de la 3e division du 17e corps de l’armée de la Loire.
Armand du Bourg, zouave et sous-officier
Armand du Bourg y est sous-officier. Il participe à la bataille d’Orléans, mais surtout à la bataille de Loigny, le 2 décembre 1870. Paris encerclé, le gouvernement de la Défense nationale souhaite un mouvement de troupe vers la capitale. Le 2 décembre au matin, le combat s’engage entre les troupes bavaroises et prussiennes et celle du XVIe corps du général de Chanzy ; 75 000 hommes se font face sur un large front. Il neige et le froid est extrême (-20 °C). De violents combats se déroulent à Loigny. Le général de Sonis est appelé en renfort. Il doit intervenir pour permettre la retraite de troupes engagées et éviter de lourdes pertes. En fin d’après-midi, 800 hommes comprenant le 1er bataillon de volontaires de l’Ouest (6 compagnies), des gardes mobiles et des francs-tireurs, s’élancent du Château de Villepion, parcourent 1500 mètres sous le feu adverse et délogent, dans un corps à corps à la baïonnette, une force ennemie de moitié supérieure à elle, cachée dans un bois, qui depuis a pris le nom de bois des zouaves. Malgré cet héroïsme et des combats en bordure du village, l’unité ne parvient pas à faire la jonction avec le 37e régiment. Peu avant la tombée du jour, le colonel de Charette ordonne la retraite. La moitié de l’expédition est décédée. Sur les 300 zouaves, 96 sont décédés, 122 blessés, soit les deux tiers du bataillon et 18 officiers hors d’état de combattre. Le sergent major du Bourg est touché à la poitrine par une balle. Il est évacué sur l’ambulance de Janville, où il décède des suites de ses blessures, le 8 décembre.
Cette seule bataille fit plus de 8000 morts et 3000 blessés. Parmi les blessés, on compte de Charette, blessé à la cuisse et qui est fait prisonnier, et le général de Sonis, lui aussi blessé à la jambe, qui fut amputé le lendemain, mais continua sa carrière.
Loigny-la-Bataille
La commune de Loigny (Eure-et-Loir) porte officiellement le nom de Loigny-la-Bataille. De nombreux monuments commémorent cette bataille et les zouaves pontificaux qui y ont pris part.
Les zouaves sont de fervents catholiques, ils étaient volontaires pour rentrer dans l’armée papale. Il existe tout un cadre religieux accompagnant cette unité et ses combats. Les volontaires de l’Ouest se sont placés sous la protection du Sacré Cœur et portent sa bannière portant la devise « Cœur de Jésus, sauvez la France » en étendard sur les lieux de combat dont Loigny. Ils sont nombreux originaires de l’Ouest de la France, une terre traditionnellement plus croyante.
D’ailleurs se mélangent souvent la religion et une profonde adhésion monarchiste. De Charrette de la Contrie, légitimiste convaincu, est un descendant direct de Charles X, lorsqu’il est élu député, il refuse de siéger. Joseph du Bourg, le frère d’Armand, fait lui aussi partie de la garde du pape, puis, après la blessure de son frère, il s’engage lui aussi comme volontaire de l’Ouest, le 4 décembre. Joseph du Bourg était le secrétaire du comte de Chambord.
Armand n’est pas le seul à s’être engagé dans cette guerre. En plus de son frère Joseph, son frère Henri est officier dans la cavalerie (Spahis) et son frère ainé Antoine, réintègre l’armée, dans le 74e régiment de marche, au lendemain de l’annonce de la mort de son frère Armand.
Xavier Martin, volontaire de l’ouest et futur élève
Il faut noter la présence d’un autre élève de l’école parmi les volontaires de l’Ouest. Xavier Martin, né à Saint-Bérain-sur-Dheune (Saône-et-Loire), le 8 février 1843, est un double bachelier. Il s’engage le 27 novembre 1870. En 1871, il intègre l’École Polytechnique, puis il poursuit son parcours à l’École des Mineurs de Saint-Étienne en octobre 1873. 3e sur 24 lors de la première année, il obtient la mention honorable. Il quitte l’École en 1875, au 5e rang, avec un brevet de 2e classe. En 1901, il devient ingénieur principal des mines à Blanzy – Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire) et quitte ses fonctions en 1908. Il décède en 1913.
Références
NOUAILLE-DEGORCE Patrick (2005) – Les volontaires de l’ouest : histoire et souvenir, de la guerre de 1870-1871 à nos jours. Thèse soutenue à l’Université de Nantes. Cette thèse a donné lieu à une publication en 2015 par Editions Edilys à Allaire « Les volontaires de l’Ouest dans la guerre de 1870-1871 : les Zouaves Pontificaux au secours de la République »
NOUAILLE-DEGORCE Patrick (2001) – Matricule de la Légion des Volontaires de l’Ouest. Archives départementales de la Vendée.